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A l’îlot des Combes, on repense l’agriculture de demain

Produire et cultiver plus durablement, c’est d’abord un mode de vie auquel Jean-Philippe Cieslak, ancien professeur de SVT, cherche à redonner du sens. Avec des amis, il y a an et demi, il a créé l’îlot des Combes, une ferme agroécologique sur les hauteurs du Creusot (Saône-et-Loire). Il en est aujourd’hui le président. Sous le soleil de ce mercredi midi, nous entamons le tour du propriétaire et Jean-Philippe m’explique les principes de son projet.




LE RETOUR A LA NATURE

L’un des problèmes de l’agriculture aujourd’hui, c’est qu’elle a voulu s’émanciper des cycles naturels. En cherchant à produire hors sol, hors saison, en se fondant sur la pétrochimie plutôt que sur la capacité naturelle de régénération des sols, ce mode de production nous a conduits dans une impasse. Les pesticides dégradent les sols et polluent les nappes phréatiques, mais il semble impossible de s’en passer.


Pour Jean-Philippe, pesticides et insecticides ne sont pas une nécessité. Pour cultiver, il faut avant tout apprendre à connaître son terrain, son climat. « L’un des piliers sur lequel on travaille ici, c’est le temps. On veut réapprendre à travailler avec le soleil et avec les saisons » m’explique-t-il alors que nous grimpons jusqu’à l’enclos des chèvres. D’ici, la vue sur le jardin en permaculture et le verger conservatoire est imprenable. Ils ne sont pas encore très fournis, mais chaque année, Jean-Philippe et les bénévoles de l’îlot des Combes plantent de nouvelles espèces. Leur culture est fondée sur l’intégration à l’écosystème. Tout est en interaction, tout a une fonction : le fumier permet de pailler les arbres, les poules mangent les parasites qui peuvent attaquer les légumes, les chèvres entretiennent le terrain en le broutant. L’objectif est le « zéro déchet », pouvoir tout réutiliser sans jamais rien gâcher.

De cette façon, l’îlot des Combes s’inscrit dans une démarche biomimétique : leur agriculture s’inspire de la résilience de la nature et cherche à recréer une « forêt nourricière », où, sans avoir besoin de l’homme, les différentes plantes s’entraident pour pousser et produire fruits, légumes et plantes aromatiques. « Ici, dans ce champ, on a déjà 30 à 40 plantes médicinales sans rien faire ! » me montre Jean-Philippe. Parfois il n’est même plus nécessaire de labourer ni de replanter, à l’image du chou perpétuel qui trône fièrement à l’entrée du potager. « Tu peux te servir comme tu veux, et il continuera à grandir ! »

S’inspirer de la nature pour cultiver n’est pas la nostalgie du passé et n’empêche pas les innovations, bien au contraire. Pour cultiver durablement, il faut savoir stocker l’énergie, en particulier l’eau de pluie, sans la gaspiller. Il a aussi fallu créer du sol sur le terrain très caillouteux et incultivable. Avec l’aide de bénévoles, Jean-Philippe a mis en place des buttes de permaculture et un « jardin en lasagne », constitué de couches de fumier, de copeaux de bois et d’herbe superposées.


(RE-)APPRENDRE A CULTIVER ENSEMBLE


L’îlot des Combes est une « oasis de ressources » selon les termes de Pierre Rabhi – ce dernier est d’ailleurs déjà venu rendre visite à l’îlot. Personne n’y vit de manière permanente, mais c’est un centre qui accueille des groupes très variés, le plus souvent pour une semaine. L’îlot des Combes peut loger 15 à 20 personnes et depuis le début, près d’un millier de personnes y sont venues. Woofeurs, scouts, bénévoles et adhérents permanents se relaient et apportent leur part. Jean-Philippe n’a pas vraiment de plan pour les années à venir. La manière de travailler est aussi à l’image des forêts nourricières : on apporte ses mains, ses compétences, même lorsqu’on ne s’y connait pas trop ; l’îlot des Combes se construit sur l’agrégation de ces petites actions.

Ce qui fait la force de l’îlot des Combes, c’est que le centre accueille des populations d’origine, d’âge et de classe socio-professionnelle très différentes. « Les gens qui viennent ici ne sont pas tous convaincus par l’agro-écologie. On a accueilli des gens qui ne mangeaient que kébab et ne connaissaient pas d’autres légumes que les tomates » assure Jean-Philippe. Il est bien conscient que « tout passe par l’éducation » et envisage de mettre en place une structure pour accueillir les enfants. L’éducation est un autre pilier sur lequel l’îlot des Combes travaille : apprendre à semer, cultiver, récolter avec les bénévoles en partageant ses expériences et ses connaissances. Plus que tout il s’agit d’encourager chacun à mettre la main à la pâte.


A l’îlot des Combes, cultiver est ainsi devenu une activité didactique. C’est un moyen de sensibiliser les jeunes à une agriculture plus soucieuse de l’environnement, mais aussi de leur apprendre à faire des choses eux-mêmes : pas seulement cultiver, mais aussi coudre, bricoler, cuisiner… « Par exemple, ce qui plait souvent, c’est de faire du Nutella maison, juste avec des amandes et des noisettes » raconte Jean-Philippe. Parce que cultiver, cuisiner, c’est aussi une activité conviviale qui permet de rassembler. « Tout commence par la cuisine ! » ponctue-t-il.


UN PROJET SOLIDAIRE


L’îlot des Combes est un projet soutenu par le Conseil régional de Bourgogne et le conseil général de Saône-et-Loire, mais fonctionne surtout grâce aux dons et aux prêts particuliers sans intérêt. Le projet est aussi parrainé par le mouvement Colibri, qui a fourni un précieuse aide en apportant des compétences et aides techniques.


Hormis trois salariés qui travaillaient au centre à ses débuts mais dont les contrats sont maintenant terminés, l’activité est uniquement bénévole. Jean-Philippe ne sait pas encore s’il pourra vendre sa production de fruits et légumes, l’îlot n’est pas encore autonome alimentairement. Dans tous les cas, le centre ne peut fonctionner que grâce à cette main-d’œuvre volontaire. Des chantiers participatifs et des semaines de formation sont organisés régulièrement ; le centre accueille également des groupes tout au long de l’année.

Pour en savoir plus et soutenir le projet : http://www.lilotdescombes.fr/

Envie d’y passer une semaine ? Contactez Jean-Philippe Cieslak : contact@lilotdescombes.fr

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