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Yoann Huon, du woofeur au paysan

  • Emilie
  • 7 juin 2016
  • 4 min de lecture

Au sud du Morbihan, au détour d’un virage, un petit écriteau « Ferme bio de Kerdelam » nous invite à emprunter un chemin de terre qui fait cahoter la voiture. Lorsque nous arrivons devant la bâtisse quelques mètres plus loin, nous sommes accueillis par Paillou, le chien de la ferme. C’est ici que s’est installé Yoann Huon, 32 ans, avec sa femme et ses deux filles il y a quatre ans maintenant. Il a commencé à exploiter ses 6 hectares de terrain en 2015. Yoann est un néo-paysan : avant de s’installer à Ploemel, il ne connaissait pas grand-chose à l’agriculture.



« FAIRE DU CONCRET » : LE CHOIX D’UN NOUVEAU MODE DE VIE


Lorsqu’il se met en tête de trouver un terrain pour monter sa ferme, Yoann est encore salarié. Il travaille alors dans le développement durable auprès des collectivités territoriales. Dans le soleil déclinant, une tasse de tisane bio fumante dans les mains (faite maison, bien sûr), il nous raconte sa déception : « il y a une différence entre la formation que l’on reçoit et la réalité du travail après ». En travaillant à l’élaboration d’un Agenda 21, il se rend compte du manque de volonté des élus, comme une impression de travailler dans le vide. Sans regret mais non sans peine, il se lance alors dans son projet de ferme biologique.

Son idée n’est pas

complètement nouvelle. Adolescent déjà, il s’imaginait acquérir un lopin de terre, son « coin de verdure ». Adepte du wwoofing (WWOOF : WorldWide Opportunities on Organic Farms), il part à 22 ans en Nouvelle-Zélande dans une ferme en permaculture, à une époque où la notion commence à émerger en France. Quand il monte sa ferme, le bio est un choix évident ; Yoann est partisan d’une agriculture qui respecte le cycle naturel. Comme ses terres n’ont pas connu d’agriculture intensive depuis les années 1960, il obtient très rapidement le label Agriculture Biologique. Mais, ce qui le motive le plus dans son projet, c’est de faire du concret, sans être subordonné à la bonne volonté des élus locaux. « Maintenant, je fais de l’aménagement du territoire à une échelle micro-locale » plaisante-il. Ce n’est d’ailleurs pas anodin s’il préfère se dire paysan, celui qui travaille le pays, plutôt qu’agriculteur.


Yoann cherche aujourd’hui à diversifier sa production. Plutôt que le maraîchage, il s’est tourné vers les plantes aromatiques et médicinales qui lui assurent des cultures pérennes et moins contraignantes, mais aussi beaucoup de possibilités de transformation : tisanes, confitures, huiles essentielles… A travers ses stages et ses lectures, il a appris à connaître les vertus des plantes aromatiques. « Les tisanes ne sont pas des pisse-mémé, la menthe poivrée est un très bon tonique par exemple ! » répond-il à ceux qui osent ironiser sur son activité. A côté de sa production de tisanes, de légumes et de fruits, il vend des « bombes à graines » qui ont un certain succès. Il a aussi acquis un cheptel de moutons dont il espère vendre la viande l’année prochaine.


UN SAUT DANS L’INCONNU OU PRESQUE


Lancé depuis moins de deux ans, Yoann admet avoir beaucoup de choses à apprendre : « je suis le plus souvent dans l’impro » avoue-t-il. Il a suivi une formation BPREA (Brevet Professionnel Responsable d’Exploitation Agricole) d’un an pour obtenir le statut d’agriculteur. Au cours de cette année de formation, il a connu d’autres néo-paysans et a pu constituer un petit réseau. Il accueille d’ailleurs sur ses terres les ruches d’un ami apiculteur. Pour le reste, ce sont surtout ses expériences de wwoofing qui l’ont aidé à choisir le type de production qui lui convenait le mieux. A tous ceux qui sont intéressés par monter leur exploitation, il conseille le wwoofing : « n’hésitez pas à multiplier les expériences pour savoir ce qui vous plait vraiment !» Des wwoofers, il en accueille d’ailleurs quasiment en permanence depuis son installation. Ces bénévoles qu’il nourrit et loge en contrepartie de leur travail lui sont une aide précieuse.


Ses parents, hôteliers, l’ont aussi beaucoup soutenu en achetant une partie de la maison sur le terrain qu’il a acquis. Les yeux dans le vague, ressassant ses souvenirs, Yoann raconte ses difficultés à trouver un terrain. « Ce qui a été le plus dur, c’était les permis de construire, les dossiers de demandes de subventions, tous les papiers administratifs. » Pendant quatre ans, il a recherché son coin de paradis. Dans une autre commune, un permis de construire lui a été refusé à cause de la loi Littorale, son projet ayant été considéré comme du mitage de l’espace littoral. C’est presque sur un coup de chance qu’il a trouvé ses 6 hectares à Ploemel. « Ça reste très difficile de trouver un terrain, les parcelles, même petites, sont très disputées ».


Malgré les aides qu’il a reçues (les DJA, Dotations pour Jeunes Agriculteurs), les dépenses restent très importantes, d’autant plus qu’il s’est lancé dans la construction d’une grange dans laquelle il souhaite aménager une petite boutique et un laboratoire. Actuellement, la ferme est donc loin d’être rentable ; le fait qu’Elodie, sa femme, travaille à l’extérieur reste un atout non négligeable. Yoann se donne cinq ans pour faire des bénéfices. En attendant, il travaille beaucoup à consolider son réseau en vente directe. Il vend déjà une partie de sa production à l’AMAP de Vannes (Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne), à une épicerie bio et a rejoint récemment la Ruche qui dit oui. Il est aussi en train de développer un site internet de vente directe avec d’autres agriculteurs du pays d’Auray et souhaite faire de sa ferme un point de dépôt.


Quand on lui demande comment il se voit dans quinze ans, Yoann répond, tout sourire : « dans un hamac, entre deux pommiers !» Son optimisme et son parcours ont de quoi faire des émules : Simon, wwoofeur strasbourgeois, est arrivé à la ferme en voulant rester deux semaines. Huit mois après, il y travaille encore et envisage de suivre la même formation que Yoann.


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